Analyse comparative des stratégies de gestion des tensions de gouvernance publique déployées par les universités (Haïti, Québec, Tunisie)
Suivant la mouvance actuelle, la modernisation de l’administration publique, par le biais de gouvernements successifs, a enclenché un vaste mouvement de transformation organisationnelle intitulé « Réforme / Modernisation de l’État ». Les trois systèmes visés dans cette étude reprennent à chaque fois le même but : la modernisation administrative et la décentralisation par l’entremise d’une gestion axée sur les résultats (GAR). Pour ce faire, différents axes stratégiques de réingénierie des processus managériaux sont définis, mais une grande priorité est accordée à celle focalisée sur la « rénovation du système administratif » dans les universités publiques, au même titre que tous les autres organismes de l’État créant différentes tensions de gouvernance. Ces tensions sont conceptualisées par Bennani et al. (2022), Gaillard (2020), Hudon & Mazouz (2014), Khenniche & Henriot (2021), Mériade, (2017), (Mériade et al., 2019) et (Mazouz & Tardif, 2011). Lesquelles tensions, entre les responsables politiques et les gestionnaires des universités publiques diffèrent grandement de ceux d’autres organismes tels les Ministères en raison du statut juridique.
Le processus de conception et de mise en œuvre mérite d’être accompagné d’études et d’analyses contextuelles rigoureuses de manière à en déceler les vrais enjeux puisqu’il n’existe pas de processus universellement valable. Une réalité qui s’explique par le fait que chaque contexte a des spécificités et complexités propres et donc des explications singulières, dans le sens de Favoreu, Carassus, et Maurel (2016); Bartoli et Ewango-Chatelet (2016) ; Bartoli et Hervé (2011) ; Hindriks (2012) ; OCDE (2005) ; Proulx (2011) ; Machiavelli (2012); Dietrich et Pigeyre (2016). Pour justifier cette affirmation, bon nombre de chercheurs ont fait état de divers processus de changement organisationnel qui, pour certains, ont été partiellement appropriés, avortés ou complètement échoués. Les cas d’Haïti, du Québec et de la Tunisie s’illustrent bien dans cette configuration. En effet, bien que les multiples tentatives majeures de changements et de transformations aient été initiées sur une période de plus de 30 années, le fonctionnement des organisations publiques de façon diversifiée tendent à se moderniser constamment (cas du Québec), parfois à s’améliorer (cas de la Tunisie) ou à tarder à se moderniser (cas d’Haïti). Pour répondre dans cette communication à la question comment les gestionnaires des universités gèrent-ils les tensions de gouvernance publique liées au processus de « rénovation du système administratif » des organisations publiques ? Ainsi, une démarche de recherche par étude de cas qualitatif (Hlady-Rispal, 2015; Gagnon, 2012a; Karsenti & Demers, 2018; Fortin & Gagnon, 2016; Corbière et al., 2014) est adoptée. Les données empiriques au moyen d’entretiens individuels et de groupe sont colligées et complétées par une analyse documentaire. Une analyse de contenus robuste permet de formaliser la mise en œuvre de nouvelles procédures administratives, financières et académiques dans les universités. L’analyse du processus dans son milieu naturel, tient compte de la prégnance de la multiplicité des rationalités des acteurs ou parties prenantes, permettant de déceler les « conditions conjecturelles et contextuelles » entourant la mise en œuvre du nouveau management public dans les universités et leurs éventuelles conséquences pratiques.