Pratique réflexive dans la formation initiale des étudiant.e.s d’origine immigrante : le cas d’un dispositif pédagogique innovant en Alberta

Le Québec, seule province francophone du Canada, accueille autour de 50 000 personnes immigrantes par année (Institut de la statistique du Québec, 2023) et cette diversité se reflète en milieux scolaires dans la métropole, mais aussi dans les autres régions (Hirsch et al., 2021). Depuis 1998, la Politique d’intégration scolaire et d’éducation interculturelle (Ministère de l’Éducation – MEQ, 1998) met de l’avant la pertinence et l’acuité de former le personnel scolaire, dont les enseignant.e.s, à « relever les défis éducatifs liés à la diversité ethnoculturelle, linguistique et religieuse des effectifs et à la nécessaire socialisation commune de l’ensemble des élèves » (MEQ, 1998, pp. 32-33). De plus, une « compétence interculturelle et inclusive » (Potvin et al., 2015) a été formalisée à l’intention des enseignant.e.s; elle a comme visée d’amener les étudiant.e.s à « adopter des pratiques inclusives qui préparent les apprenants à vivre ensemble dans une société pluraliste et qui tiennent compte des expériences et réalités ethnoculturelles, religieuses, linguistiques ou migratoires des apprenants, particulièrement celles des groupes minorisés » (p.40). Dans les dernières années, le nombre d’élèves réfugié·e·s ou qui demandent l’asile est en constante augmentation dans le système scolaire québécois. Cette réalité, conjuguée au fait que plusieurs familles s’installent dans des régions où les écoles ont moins l’habitude d’accueillir des familles récemment arrivées, suscitent différents défis et met en évidence certains besoins en termes de formation. Dans le cadre de cette communication, partant d’un corpus de récits de pratique (Desgagné, 2005) recueillis auprès d’enseignant.e.s (Audet, 2022; Audet et al., 2022) et d’entretiens compréhensifs (Kaufmann, 2007) auprès d’enseignant.e.s dans des classes d’accueil au primaire (Koubeissy, 2023), nous illustrerons d’abord la pertinence d’une formation accrue des futur.e.s enseignant.e.s et des enseignant.e.s. en exercice à la prise en compte des réalités et des expériences pré et périmigratoires des élèves réfugié.e.s et de leurs familles. En effet, les analyses nous permettent, d’une part, d’avancer que les enseignant.e.s ne sont pas toujours en mesure de réaliser la diversité des profils des enfants réfugié.e.s ou en demande d’asile et de leurs familles, ni celle de leurs réalités et de leurs expériences avant la migration ou pendant celle-ci, notamment des déplacements dans des pays de transit ou encore des périodes plus ou moins longues dans des camps, incluant souvent des interruptions de scolarité. D’autre part, les analyses nous permettent également de mettre en évidence que, même quand ils et elles sont conscient.e.s de la diversité des profils, des réalités et des expériences, ils et elles ne sont pas nécessairement formé.e.s pour en tenir compte. À la lumière de ces résultats, nous présenterons ensuite diverses initiatives de recherche et de formation en cours (Koubeissy, Audet et Arvisais, 2022 et en cours; Jean Baptiste, 2022 et Koval, en cours) qui, à notre avis, sont susceptibles de soutenir le développement professionnel des enseignant.e.s et d’autres personnels scolaires.