Apprentissage de la lecture et déficience intellectuelle : Mythes à déconstruire et pratiques pédagogiques adaptées
Lire est une compétence essentielle pour assurer la participation sociale des individus. Pourtant, les personnes ayant une déficience intellectuelle qui arrivent à lire et à comprendre un texte simple représentent un faible pourcentage. Selon Katims (2001), au sortir de leur scolarité, seul un élève ayant une déficience intellectuelle moyenne à sévère (DIMS) sur cinq aurait un niveau de lecture supérieur aux élèves tout-venant d’environ six ou sept ans.
Cet écart s’explique en partie par les caractéristiques cognitives et non cognitives de la personne ayant une déficience intellectuelle ainsi que par les spécificités du français écrit. En effet, différents éléments placent l’élève ayant une déficience intellectuelle en situation de handicap lorsqu’il est confronté à une situation de lecture (Beaulieu et Langevin, 2014). Par exemple, une discrimination visuelle restreinte des lettres, une mémoire de travail déficitaire ou encore l’instabilité des correspondances graphèmes-phonèmes en français constituent des exemples d’éléments qui contribuent à la difficulté d’accès au langage écrit.
En plus de ces caractéristiques, d’autres circonstances rendent l’apprentissage de la lecture difficile, comme les croyances des enseignants envers ce que devraient apprendre les personnes ayant une déficience intellectuelle. En effet, une recension à cet effet (Jolicoeur, et al. 2023) révèle que les apprenants ayant une DI devraient avant tout développer des compétences fonctionnelles, ce qui influence les attentes ainsi que le choix de méthodes d’enseignement. De plus, les enseignants se sentent peu outillés et associent le niveau de déficience intellectuelle, de faibles capacités à communiquer et la présence de défis comportementaux à l’impossibilité d’apprendre à lire (Jolicoeur et al., 2023).
Du côté de la recherche, les différentes initiatives pour favoriser l’apprentissage de la lecture chez les élèves ayant une DIMS se concentrent habituellement sur un des cinq piliers de la lecture parmi la conscience phonémique, le principe alphabétique, la fluidité, le vocabulaire et la compréhension (National Reading Panel, 2023). De plus, le développement de la technologie des dernières années a favorisé de nouvelles façons de faire et a permis de repenser l’apprentissage de la lecture chez les personnes ayant une DIMS (Brassard et al., 2022).
Dans le cadre d’un projet de recherche financé par les Fonds institutionnels de l’Université du Québec à Rimouski, au Canada, une application, accessible par ordinateur ou tablette, est développée depuis un peu plus d’un an. Des textes en format accessible (Ruel et Allaire, 2018) abordent des thèmes d’actualité et sont accompagnés d’images faciles à comprendre. Une synthèse vocale est disponible au besoin. Après la lecture d’un texte, des questions de compréhension sont répondues tout en apportant un soutien progressif à l’élève.
En plus d’aborder les raisons entourant certains mythes à propos de l’apprentissage de la lecture chez les personnes ayant une déficience intellectuelle, cette communication propose de présenter les différentes étapes de la recherche entourant le développement d’une application pour favoriser la compréhension en lecture chez les personnes ayant une déficience intellectuelle moyenne à sévère. Les avancées réalisées dans la dernière année seront discutées.

Le Forum mondial sur l’éducation, tenu en mai 2015 à Incheon sous l’égide de l’UNESCO et ses partenaires, s’est conclu par la Déclaration d’Incheon pour l’Éducation 2030, un engagement historique de transformer la vie grâce à une nouvelle vision de l’éducation et à des actions courageuses et innovantes pour la réaliser. Le Cadre d’action Éducation 2030, qui établit cette nouvelle vision de l’éducation pour les 15 années à venir, a été adopté par plus de 180 états membres de l’UNESCO. Quatre ans plus tard, à la 9e Réunion mondiale de la Consultation collective des ONG pour Éducation 2030 (CCONG-Éducation 2030), qui s’est tenue en Tunisie en 2019, les organisations participantes ont affirmé que le monde est confronté à une crise éducative, causée par un manque de volonté politique, une faible priorisation de l’éducation et un financement insuffisant. De plus, elles ont constaté une tendance croissante à la commercialisation de l’éducation, ce qui contribue à creuser davantage les inégalités. Les systèmes éducatifs mondiaux ne semblaient pas respecter l’engagement pris dans le programme Éducation 2030. Le ministre de l’Éducation de la Tunisie d’alors avait, à la même occasion, souligné que la plupart des pays n’avancent pas suffisamment pour atteindre les objectifs fixés pour 2030. Il a appelé à une reconnaissance de l’importance stratégique de l’éducation pour toutes les nations et a encouragé la société civile à jouer un rôle majeur dans la mobilisation pour y parvenir.