Évolution des constructions sociales du décrochage scolaire au Québec de 1960 à 2022, perspective transectorielle et intersectorielle des politiques publiques
Institutionnalisé au Québec au début des années 1990 (Moulin et al., 2017) dans la foulée des réformes à grandes échelles (Carpentier, 2012) et de l’arrivée de la gestion axée sur les résultats (Bernatchez, 2018), le décrochage scolaire est un phénomène multidimensionnel et multifactoriel complexe (Bruno et al., 2017; Janosz, 2000). C’est un problème social (Proulx et al., 2018), un problème économique (Moulin et al., 2017), et un problème politique qui nécessite une action politique (Bernatchez, 2018).
Or, et comme l’ont apporté Bruno et al. (2017), le décrochage scolaire présente un aspect polysémique qui peut le rendre difficile à identifier, ici compris comme l’abandon, là l’absentéisme, et là-bas l’échec. L’agir sur le phénomène est aussi passé de lutte au décrochage scolaire, à l’action en faveur de la persévérance scolaire (Berthelet et Bourdon, 2019). De plus, l’action sur le décrochage scolaire s’est inscrite dans un agir au palier local, puis régional, pour revenir vers le pallier local en 2015 (Berthelet et Bourdon, 2019).
Quelle lecture peut-on faire de l’évolution des référentiels liés au décrochage scolaire ? À travers ces référentiels, quels rôles se dégagent pour les enseignant.es? Existe-t-il des différences entre les référentiels d’un secteur à un autre? 
Pour répondre à ces questions, nous proposons une perspective transectorielle et intersectorielle de l’évolution des constructions sociales du décrochage scolaire des jeunes qui fréquentent l’école secondaire au Québec de 1960 à 2021.
Sur le plan théorique, nos travaux s’appuient sur les approches cognitives de l’analyse des politiques publiques (de Maillard et Kübler, 2015) et plus particulièrement sur les référentiels des politiques publiques comme constructions sociales qui expriment une réalité (Muller, 2019). Notre cadre conceptuel mobilise aussi les dimensions de territoire comme étant un espace social en mouvance (Giraut, 2008), d’intersectorialité et de transectorialité de l’action publique (Muller, 2010), et celui de décrochage scolaire comme problème public (Bernard, 2019) et construction politique (Bernatchez, 2018).
Lors de notre communication, nous définirons d’abord les objets que nous avons analysés : abandon, décrochage, persévérance, réussite éducative et scolaire. Nous présenterons les dimensions mobilisées dans notre cadre conceptuel, et le schéma qui a constitué notre grille d’analyse. Ensuite, nous préciserons notre cadre méthodologique, basé sur l’analyse documentaire (Bardin, 2013) de politiques publiques publiées au Québec, entre 1960 et 2021, répondant à nos critères d’inclusion. Puis, nous présenterons, d’une part, les grands changements dans les référentiels sur les objets analysés. D’autre part, nous nous intéresserons aux changements dans les rôles proposés aux enseignant.es dans la lutte au décrochage scolaire, à travers l’analyse de ces référentiels. Finalement, nous proposerons des apprentissages à retenir de ces résultats pour les parties prenantes du milieu scolaire, et tout particulièrement pour les enseignant.es.

 Le Forum mondial sur l’éducation, tenu en mai 2015 à Incheon sous l’égide de l’UNESCO et ses partenaires, s’est conclu par la Déclaration d’Incheon pour l’Éducation 2030, un engagement historique de transformer la vie grâce à une nouvelle vision de l’éducation et à des actions courageuses et innovantes pour la réaliser. Le Cadre d’action Éducation 2030, qui établit cette nouvelle vision de l’éducation pour les 15 années à venir, a été adopté par plus de 180 états membres de l’UNESCO. Quatre ans plus tard, à la 9e Réunion mondiale de la Consultation collective des ONG pour Éducation 2030 (CCONG-Éducation 2030), qui s’est tenue en Tunisie en 2019, les organisations participantes ont affirmé que le monde est confronté à une crise éducative, causée par un manque de volonté politique, une faible priorisation de l’éducation et un financement insuffisant. De plus, elles ont constaté une tendance croissante à la commercialisation de l’éducation, ce qui contribue à creuser davantage les inégalités. Les systèmes éducatifs mondiaux ne semblaient pas respecter l’engagement pris dans le programme Éducation 2030. Le ministre de l’Éducation de la Tunisie d’alors avait, à la même occasion, souligné que la plupart des pays n’avancent pas suffisamment pour atteindre les objectifs fixés pour 2030. Il a appelé à une reconnaissance de l’importance stratégique de l’éducation pour toutes les nations et a encouragé la société civile à jouer un rôle majeur dans la mobilisation pour y parvenir.
Le Forum mondial sur l’éducation, tenu en mai 2015 à Incheon sous l’égide de l’UNESCO et ses partenaires, s’est conclu par la Déclaration d’Incheon pour l’Éducation 2030, un engagement historique de transformer la vie grâce à une nouvelle vision de l’éducation et à des actions courageuses et innovantes pour la réaliser. Le Cadre d’action Éducation 2030, qui établit cette nouvelle vision de l’éducation pour les 15 années à venir, a été adopté par plus de 180 états membres de l’UNESCO. Quatre ans plus tard, à la 9e Réunion mondiale de la Consultation collective des ONG pour Éducation 2030 (CCONG-Éducation 2030), qui s’est tenue en Tunisie en 2019, les organisations participantes ont affirmé que le monde est confronté à une crise éducative, causée par un manque de volonté politique, une faible priorisation de l’éducation et un financement insuffisant. De plus, elles ont constaté une tendance croissante à la commercialisation de l’éducation, ce qui contribue à creuser davantage les inégalités. Les systèmes éducatifs mondiaux ne semblaient pas respecter l’engagement pris dans le programme Éducation 2030. Le ministre de l’Éducation de la Tunisie d’alors avait, à la même occasion, souligné que la plupart des pays n’avancent pas suffisamment pour atteindre les objectifs fixés pour 2030. Il a appelé à une reconnaissance de l’importance stratégique de l’éducation pour toutes les nations et a encouragé la société civile à jouer un rôle majeur dans la mobilisation pour y parvenir.