La place du capital émotionnel dans les pratiques accompagnatrices en contexte universitaire. Des faits aux effets.
– Contexte général
Les métiers de l’éducation et de la formation ont , manifestement, énormément évolué durant les deux dernières décennies et connaissent encore aujourd’hui de nouvelles évolutions, voire des crispations. La succession des réformes du système éducatif, la démographisation scolaire et les disparités sociales, la remise en cause du rapport d’autorité, la montée fulgurante de la violence et de la délinquance juvénile, le problème de l’ingérence des responsables politiques, en matière d’une bonne gouvernance éducative, etc. participent directement, ou par ricochet, de ces tensions et constituent le pari sur lequel doivent miser les responsables du monde éducatif. Ainsi, au premier plan, les enseignant sont appelés donc à tenir compte de ces mutations sociétales en faisant face à un public difficilement gérable, à des pratiques d’incivilité au sein de l’établissement, au manque de motivation auquel s’ajoutent l’absence de reconnaissance, voire la « déreconnaissance » avec la stigmatisation sociale qui peut leur être infligée (Bénédicte Gendron, 2009). Dans un contexte de crise aussi difficile, tous les yeux semblent se diriger vers les enseignants pour trouver un soutien. D’où l’intérêt de savoir si les enseignants sont suffisamment outillés en management émotionnel pour créer un climat émotionnellement favorable susceptible d’optimiser leurs actes d’accompagnement.
– Objectifs de recherche
Montrer en quoi le concept d’Intelligence émotionnelle (IE) serait l’instrument par excellence de la résonnance et de la performance, mais aussi comment en user efficacement dans l’acte d’accompagner- par la mise en œuvre d’un cadre conceptuel sur l’IE qui a été profondément enrichi au cours deux dernières décennies (Gendron, 2009 ; Martin 2005 ; Brown, 1999 ; Lafortune, 2006, 2007a, 2007b, 2004 ; Saarni, 1999). Cette étude tente de donner accès à des pistes d’intervention pour mieux comprendre la part non négligeable des émotions dans les pratiques professionnelles des enseignants. Autrement formulé, notre intention étant de tenter de tisser des liens palpables et visibles entre la théorie et les pratiques, entre les savoirs scientifiques et les savoirs d’expériences.
– Cadre méthodologique
Nous nous sommes inspiré d’un modèle méthodologique expertisé et validé par Lafortune. 2009 qui s’inscrit dans le cadre d’un Projet d’accompagnement-recherche- formation(PARF) de la mise en œuvre du Programme de formation de l’école québécoise (PFEQ). Nous pensons que ce modèle est en parfaite adéquation avec notre problématique de départ. Ainsi, nous avons procédé à un questionnaire associé à la prise en compte des émotions à partir de la description de situations où les émotions étaient en cause. Ce questionnaire a été distribué et rempli par 120 personnes accompagnatrices en cycle supérieur et dont le profil (enseignant-vacataire, PESA, PH, PES) et la formation antérieure (littérature, didactique, économie, statistique, droit, sciences de gestion, etc.) sont divers. Ce questionnaire demandait de décrire une expérience d’accompagnement où les émotions ont facilité l’intervention des personnes accompagnatrices et de rapporter une autre expérience d’accompagnement où les émotions ont rendu leur intervention difficile.
– Mots-clés :
Contexte de crise/ changement/ accompagnement/ Intelligence émotionnelle/ performance

Le Forum mondial sur l’éducation, tenu en mai 2015 à Incheon sous l’égide de l’UNESCO et ses partenaires, s’est conclu par la Déclaration d’Incheon pour l’Éducation 2030, un engagement historique de transformer la vie grâce à une nouvelle vision de l’éducation et à des actions courageuses et innovantes pour la réaliser. Le Cadre d’action Éducation 2030, qui établit cette nouvelle vision de l’éducation pour les 15 années à venir, a été adopté par plus de 180 états membres de l’UNESCO. Quatre ans plus tard, à la 9e Réunion mondiale de la Consultation collective des ONG pour Éducation 2030 (CCONG-Éducation 2030), qui s’est tenue en Tunisie en 2019, les organisations participantes ont affirmé que le monde est confronté à une crise éducative, causée par un manque de volonté politique, une faible priorisation de l’éducation et un financement insuffisant. De plus, elles ont constaté une tendance croissante à la commercialisation de l’éducation, ce qui contribue à creuser davantage les inégalités. Les systèmes éducatifs mondiaux ne semblaient pas respecter l’engagement pris dans le programme Éducation 2030. Le ministre de l’Éducation de la Tunisie d’alors avait, à la même occasion, souligné que la plupart des pays n’avancent pas suffisamment pour atteindre les objectifs fixés pour 2030. Il a appelé à une reconnaissance de l’importance stratégique de l’éducation pour toutes les nations et a encouragé la société civile à jouer un rôle majeur dans la mobilisation pour y parvenir.